poèmes
    

François Villon
sa vie, son oeuvre

Un poème au hasard


 
Ballade [de la Grosse Margot]

Se j'ayme et sers la belle de bon het,
M'en devez vous tenir ne vil ne sot ?
Elle a en soy des biens affin soubzhet ;
Pour son amour seins boucler et passot.
Quant viennent gens, je cours et happe ung pot,
Au vin m'en voys, sans demener grant bruyt ;
Je leur tens eaue, froumaige, pain et fruyt.
S'ilz paient bien, je leur diz : «Bene stat,
Retournez cy, quant vous serez en ruyt,
En ce bordeau ou tenons nostre estat. »

Mais adoncques, il y a grant deshet,
Quant sans argent s'en vient coucher Mergot ;
Voir ne la puis, mon cueur a mort la het.
Sa robe prens, demy seint et seurcot,
Sy luy jure qu'il tendra pour l'escot.
Par les costez se prent, c'est Antecrist,
Crye et jure, par la mort Jhesucrist
Que non fera. Lors empoingne ung esclat,
Dessus son nez lui en faiz ung escript,
En ce bordeau ou tenons nostre estat.

Puis paix se fait, et me fait ung groz pet,
Plus enffle qu'un velimeux escarbot.
Riant, m'assiet son poing sur mon sommet,
Gogo me dit, et me fiert le jambot ;
Tous deux yvres dormons comme ung sabot.
Et au resveil, quant le ventre lui bruyt,
Monte sur moy, que ne gaste son fruyt,
Soubz elle geins, plus qu'un aiz me fait plat ;
De paillarder tout elle me destruyt,
En ce bordeau ou tenons nostre estat.

Vente, gresle, gesle, j'ay mon pain cuyt.
Je suis paillart, la paillarde me suyt.
Lequel vault mieulx ? Chascun bien s'entressuyt,
L'un vault l'autre, c'est a mau rat mau chat.
Ordure aimons, ordure nous affuyt;
Nous deffuyons honneur, il nous deffuyt,
En ce bordeau ou tenons nostre estat.


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