poèmes
    

Émile Nelligan
sa vie, son oeuvre

Un poème au hasard


 
Le Robin des Bois

Pendant que nous lisions Werther au fond des bois,
Hier s'en vint chanter un robin dans les branches ;
Et j'ai saisi vos mains, j'ai saisi vos mains blanches,
Et je vous ai parlé d'amour comme autrefois.

Mais vous êtes restée insensible à ma voix,
Muette au jeune aveu des affections franches ;
Quand soudain, vous levant, courant dans les pervenches,
Émue, et m'appelant, vous m'avez crié : " Vois ! "

Voici qu'était tombé du frissonnant feuillage
L'oiseau sentimental, frappé dans son jeune âge,
Et qui mourait sitôt, pauvre ami du printemps.

Et vous le pleuriez, regrettant sa romance,
Pendant que je songeais, fixant l'azur immense :
Le Robin et l'Amour sont morts en même temps !

  
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